SÉNÉGAL : PLACER L’ENVIRONNEMENT AU COEUR DU DÉBAT POLITIQUE


A l’approche de l’élection présidentielle, alors que les différents candidats se préparent à entrer en scène devant des millions de Sénégalais, les environnementalistes s’inquiètent. Ils s’inquiètent d’autant plus que l’avenir de la planète n’a jamais été aussi précaire : raréfaction des ressources (eau, produits halieutiques, denrées alimentaires, réchauffement climatique dû aux gaz à effet de serre, crise énergétique, etc. Malgré cette menace qui pèse sur la planète que nous partageons, les questions environnementales sont inscrites aux abonnés absents dans les débats politiques au Sénégal et en Afrique en général.


POURQUOI L’ENVIRONNEMENT EST ABSENT DES DÉBATS POLITIQUES ?

Au Sénégal, l’environnement a toujours été absent du débat politique. La plupart des candidats préfèrent s’attarder sur des questions de politiques politiciennes ou cryptopersonnelles qui représentent 1% des problèmes mais qui occupent 90% des débats. Cette absence de l’environnement dans les débats est-elle due au fait que :

  • les populations ne s’intéressent pas à l’environnement pour exiger de la classe politique de l’inscrire dans les sujets de campagne
  • les médias ne lui donnent pas la place qui sied dans l’espace médiatique, ce qui aurait tendance à réduire son importance et son impact
  • les hommes politiques jugent que c’est une question trop technique

Les précampagnes ne semblent pas donner à l’environnement une place centrale et pourtant, le développement durable et l’avenir de l’économie de tout pays passent aujourd’hui par l’environnement. On a l’impression que la gravité de la crise environnementale n’a aucunement modifié le logiciel des candidats déclarés ou putatifs, ils n’en parlent pour ainsi dire jamais.

Qui parmi les candidats a perçu, à sa juste valeur, l’impératif écologique pour s’en appuyer afin de proposer un programme qui soit imprégné de l’environnement dans ses déclinaisons économiques, sociales et culturelles ? Pour être en phase avec l’esprit du pacte écologique dans lequel s’inscrit le Sénégal en signant toutes les conventions et protocoles internationaux de préservation et de sauvegarde de l’environnement, les candidats devraient préparer la société à des mutations profondes. Pour cela, ils doivent tout d’abord s’imprégner des enjeux environnementaux et profiter de leurs temps de campagne pour faire cette pédagogie, appeler les populations à changer de comportement et à respecter la nature.

Il est certain que la question de l’énergie, du fait de son indisponibilité, occupera une place centrale dans les débats mais malheureusement non pas parce qu’elle a un lien direct avec le réchauffement climatique mais pour d’autres raisons.


DES IDÉES POUR METTRE L’ENVIRONNEMENT AU COEUR DU DÉBAT ?

Pour mettre l´environnement au coeur du débat de la campagne présidentielle, un certain nombre d’idées a été proposé :

  • Les médias doivent comprendre leur rôle et leur devoir citoyen de sensibiliser l´opinion publique aux graves problèmes d´environnement. Sans information, les citoyens ne peuvent être sensibles aux questions environnementales
  • Les populations doivent faire comprendre aux politiques que leurs choix environnementaux pèseront dans la balance lors d’élections. Ce sera une façon de forcer les candidats à baser leur politique future autour de l’environnement.
  • Mettre en avant le coût astronomique du changement climatique pour la société, mais aussi son ratio par habitant. Un coût qui est un boulet pour l´économie et qui est supérieur aux gains de croissance que pourrait générer une politique qui ignore l´environnement.
  • Convaincre les partenaires sociaux que sont les syndicats, la société civile, les organisations non gouvernementales, associations, qu´il est de leur responsabilité de faire pression sur les politiques pour régler les problèmes d´environnement.
  • Réfléchir comment créer un fond d’impulsion à l’environnement et/ou aux métiers verts. Une taxation sur des produits qui impactent négativement l’environnement comme le tabac, le gasoil, l’essence, les bâtiments à façade de verre, etc. pourrait alimenter ce fonds.
  • Il faudrait réfléchir à l’introduction dans le curricula scolaire des enseignements sur l’environnement. Souvent, les environnementalistes s’approprient la phrase de Saint-Exupéry qui dit que « Nous n’héritons pas de la Terre de nos ancêtres, nous l’empruntons à nos enfants ». Mais nous dirons à quels enfants nous allons confier cette planète. Si ces derniers ignorent les enjeux environnementaux, pourront-ils en faire une priorité de demain ?
  • Mettre en avant les risques sanitaires et de santé publique liés aux catastrophes naturelles, à l’introduction de produits (surtout alimentaires) non contrôlés. Pour cela, il faudra doter les structures étatiques d’équipements appropriés, en plus d’une formation adéquate des agents (surtout en matière de nucléaire et en agroalimentaire)

Cette liste d’idées n’est pas exhaustive. Elle devrait être complétée par tous les citoyens qui aspirent à vivre dignement dans un environnement sain. En effet, l’environnement est une affaire de tous, nous ne pouvons le laisser aux seuls politiques. C’est à nous, citoyens, de donner le ton de la musique.


 

© Mag VIE | par Pr. Adams TIDJANI