Au Botswana, polémique autour de la mort d’éléphants et de la lutte antibraconnage


Une centaine d’éléphants ont été retrouvés morts ces dernières semaines au Botswana victimes d’une vague meurtrière de braconnage, a affirmé mardi une ONG indépendante, vivement démentie par le gouvernement qui a crié à la tromperie.

L’organisation Eléphants sans frontières (EWB) a affirmé avoir recensé 90 carcasses de pachydermes lors d’un recensement aérien conduit récemment avec le ministère botswanais de la Faune sauvage et des Parcs nationaux (DWNP). « Nous avons commencé notre recensement le 10 juillet et nous avons déjà dénombré 90 carcasses d’éléphants », a expliqué le responsable de l’ONG, Mike Chase, « et nous retrouvons chaque jour plus d’éléphants morts ».

La plupart ont été tués par « des balles de gros calibre », selon M. Chase, près de points d’eau de la célèbre réserve du delta de l’Okavango, dans le nord de Botswana.

« Il s’agit du plus grave épisode de braconnage en Afrique dont j’ai jamais été informé », a souligné le défenseur de la faune.

Le gouvernement botswanais a démenti quelques heures plus tard le bilan avancé par l’ONG et les causes de la mort des éléphants.

« Ces statistiques sont fausses et trompeuses », a-t-il vivement dénoncé sur son compte Twitter, « il n’y a jamais eu ces derniers mois ou récemment 87 ou 90 éléphants tués en un seul incident où que ce soit au Botswana ».

Selon les autorités, EWB n’a dénombré que 53 carcasses d’éléphants lors de son recensement, dont « une majorité n’ont pas été victimes de braconnage mais plutôt morts de cause naturelle ou de conflits entre l’homme et la faune ».

Le patron d’Eléphants sans frontières a établi un lien direct entre cette vague inédite de décès d’éléphants et la décision controversée des autorités de Gaborone, en mai, de désarmer ses « rangers » spécialisés dans la lutte antibraconnage.

Coincé entre la Zambie et l’Afrique du Sud, le Botswana abrite la plus grande population africaine d’éléphants en liberté, évaluée à encore 135.000 animaux en 2015.

La richesse de sa faune en a fait un sanctuaire très prisé des amateurs de safaris haut de gamme et un des pôles de développement de son économie, qu’il protège grâce à un arsenal antibraconnage jusque-là considéré comme exemplaire.

Jusqu’au mois de mai, ses « rangers » étaient ainsi lourdement armés et autorisés à tirer sur les braconniers.

Mais en mai dernier, le nouveau président Mokgweetsi Masisi, en place depuis le mois précédent, a ordonné le désarmement des unités, sans jamais jusque-là en expliquer ouvertement les raisons.

Son prédécesseur Ian Khama était considéré un défenseur passionné de la faune sauvage de son pays.

Dans sa riposte, le gouvernement a catégoriquement nié tout lien « malencontreux » entre le désarmement de ses « rangers » et une éventuelle recrudescence des activités de braconnage.

« Le retrait des armes (…) n’a créé aucun vide dans nos opérations », a-t-il affirmé, précisant que la décision avait été prise « en conformité avec la loi qui interdit (au ministère) de posséder ces armes » et que des mesures de substitution seraient prises.

Le gouvernement a nié tout changement de politique en matière de défense de la faune. « Notre faune sauvage reste un héritage national et nos citoyens la protègeront à tout prix », a-t-il conclu.

Le Fonds international pour le bien-être animal (IFAW) s’est dit choqué par l’ampleur du massacre.

« Jusque-là, les troupeaux d’éléphants étaient largement laissés en paix au Botswana », a relevé son vice-président, Jason Bell, « mais désormais ils sont dans la ligne de mire des braconniers ».

L’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) estime que le très rémunérateur trafic de l’ivoire ont fait dégringoler le nombre des éléphants de 415.000 à 111.000 au cours de la dernière décennie en Afrique.

Ses études révèlent qu’environ 30.000 pachydermes sont victime chaque année du braconnage.