Huile de palme: bras de fer entre la France et la Malaisie


Depuis que Nicolas Hulot, le ministre français de la Transition écologique, a annoncé vouloir réduire l’importation d’huile de palme non durable, la Malaisie, l’un des principaux exportateurs, menace la France de mesures de rétorsion commerciale.

C’est l’un des axes majeurs du plan climat de Nicolas Hulot : « Mettre fin à l’importation en France de produits contribuant à la déforestation. » En tête de ces produits, on retrouve le bois, le soja, le coton, l’hévéa et le cacao, mais aussi bien sûr l’huile de palme.

En présentant son plan d’action le 6 juillet, le ministre de la Transition écologique a promis une « approche ambitieuse » pour la France, qui restreindrait notamment l’importation d’huile de palme produite en Indonésie et en Malaisie.


La Malaisie menace la France de représailles

La nouvelle ne ravit pas les exportateurs : à elles seules, les plantations indonésiennes et malaisiennes représentent 85% de la production mondiale et la demande croît de 8,7% par an en moyenne depuis 1995.

Le ministre malaisien de l’Industrie forestière et des Matières premières, Mah Siew Keong, a annoncé le 11 juillet dans un communiqué que la Malaisie envisageait de prendre des mesures de rétorsion commerciale contre la France : « La Malaisie n’a pas d’autre choix qu’examiner ses options qui englobent le commerce avec la France et la réduction d’achats de produits français. […] Je pense que de telles attaques contre l’industrie de l’huile de palme doivent cesser pour que le commerce entre la Malaisie et la France demeure fort et continue de progresser. » Il a également appelé la France et les autres pays européens à « travailler avec[la Malaisie] pour répondre à leurs inquiétudes sur la durabilité ».


Un impact considérable sur la déforestation

A l’origine de ces inquiétudes, la déforestation, dont l’huile de palme est largement responsable dans les régions tropicales, et particulièrement en Asie du Sud-Est. D’après les données de La Table ronde pour une huile de palme durable (RSPO), qui regroupe producteurs et ONG, 8,7 millions d’hectares de forêt ont été rasés entre 1990 et 2010 en Indonésie, en Malaisie et en Papouasie-Nouvelle-Guinée, au profit des cultures de palmiers à huile.

Et la déforestation s’accélère : de 2011 à 2013, quelque 6 millions d’hectares boisés seraient partis en fumée, l’équivalent de la surface de l’Irlande. A elle seule, la déforestation représente plus de 10% des émissions de gaz à effet de serre, rappelait Nicolas Hulot le 6 juillet.

Mais l’huile de palme est peu coûteuse à produire, avec un bien meilleur rendement que le soja, le tournesol ou le colza : les palmiers à huile produisent des fruits toute l’année, deux fois par mois. Ces derniers contiennent 50% d’huile, pour une productivité de 4 tonnes d’huile par hectare et par an. En Malaisie, l’huile de palme représente aujourd’hui 11% du PIB national.


La France, fer de lance en Europe

Pour l’instant, l’exportation d’huile de palme n’est pas endiguée par les pays occidentaux, mais le vent commence à tourner. En avril dernier, le Parlement européen a adopté une résolution demandant que seule l’huile de palme durable soit importée dans l’Union européenne à l’horizon 2020. Il s’agit d’une résolution non contraignante, mais la France pourrait faire figure d’exemple en Europe.

Une semaine après les déclarations du ministre français, le syndicat des producteurs indonésiens d’huile de palme (GAPKI) a exprimé ses craintes que le projet de Nicolas Hulot n’incite d’autres pays européens à faire de même, et provoque par là une baisse des exportations. Telle est bien l’intention du ministre de la Transition énergétique, qui rappelle dans son plan d’action que « la France assurera la présidence des Déclarations d’Amsterdam au premier semestre 2018 et jouera un rôle moteur pour promouvoir un tel engagement à l’échelle européenne ».


 

Src: rfi.fr