TRAFIC DE BOIS PRÉCIEUX AU SÉNÉGAL : QUI SONT LES DEUX FRANÇAIS CITÉS ?


Les deux hommes travaillaient dans une société accusée d’avoir exporté illégalement 315 000 tonnes de bois de rose de la région de Casamance, au Sénégal.

Le 2 avril dernier, Le Point Afrique révélait qu’un homme d’affaires suisse, Nicolae Bogdan Buzaianu, était soupçonné d’avoir abattu illégalement, entre 2014 et 2017, des milliers de tonnes de bois précieux avec la complicité de l’ancien président de Gambie Yahya Jammeh. Le bois de rose, une espèce protégée, était exporté via le port de Banjul, en Gambie, pour être commercialisé en Chine. Les troncs ne provenaient pas de Gambie, mais du pays voisin, le Sénégal. Plus précisément de Casamance, région en proie à un conflit armé. Ce « commerce » (qui aurait rapporté 163 millions de dollars) permettait aussi de financer une organisation séparatiste, le Mouvement des forces démocratiques de Casamance (MFDC). En juin 2019, l’ONG Trial International a dénoncé ce trafic auprès du ministère public de la Confédération à Berne. Mais, la justice suisse prenant apparemment son temps pour se saisir du dossier, Trial International a alerté la presse en mars 2020.


Des virements en liquide

En Gambie, en revanche, l’enquête suit son cours depuis la chute de l’ancien président, contraint de fuir son pays en 2017, après sa défaite aux élections présidentielles. Et d’autres noms apparaissent, comme ceux de Dragos Buzaianu, le neveu de Nicolae Bogdan Buzaianu, directeur de l’entreprise Westwood, exportatrice du bois de rose, et du Français Anthony Panetta, administrateur de l’entreprise. Ils auraient reconnu que « la majorité du bois exporté depuis la Gambie provenait de la Casamance, dans le sud du Sénégal ». Devant la commission d’enquête, qui se penche sur les agissements de Yahya Jammeh, Anthony Panetta a admis qu’il « traitait » avec un haut responsable militaire, proche de l’ancien président. En clair, il effectuait des versements en liquide ou par virement bancaire à un chef militaire.


Étrange recrutement au ministère de l’Environnement

Interrogé sur cette pratique, Anthony Panetta a répondu que, pour un Français, elle était « très étrange » mais que la Gambie semblait avoir « des règles différentes ». Un autre Français apparaît dans le dossier, Gabriel Akram Nakhleh, qui aurait, selon Radio France Internationale, occupé les fonctions de « premier secrétaire ». Dragos Buzaianu, Anthony Panetta et Gabriel Akram Nakhleh « auraient géré les affaires courantes de Westwood et mis la pression sur les acteurs locaux du commerce de bois pour qu’ils exportent leur production via Westwood », écrit encore RFI.

Si Anthony Panetta ne mentionne pas ses coordonnés, en revanche, Gabriel A. Nakhleh, très visible sur les réseaux sociaux, se présente sur LinkedIn comme « Navy officer at Ministère de l’Environnement » et se déclare domicilié à Monaco. Simple coïncidence ? Le Suisse Nicolae Bogdan Buzaianu s’est longtemps présenté comme le consul honoraire de Gambie dans la principauté. Dans un article paru le 14 avril dernier, le site d’investigations suisse Gotham City déplorait que Gabriel Akram Nakhleh ne répondait pas à ses messages. Le Point Afrique n’a pas obtenu non plus de retour de la part de Gabriel A. Nakhleh. En revanche, le ministère de la Transition écologique et solidaire (le nom actuel de l’ancien ministère de l’Environnement) nous a répondu le 22 avril que « M. Nakhleh, après plusieurs années de disponibilité, a été réintégré dans les effectifs de la Transition écologique et solidaire en février 2019 en tant qu’administrateur des affaires maritimes (statut militaire) puis, compte tenu d’éléments liés à une enquête en cours, a été suspendu depuis le 25 octobre 2019 ». Toutefois, le ministère ne souhaite pas commenter davantage cette affaire en cours.


 

Src: Le Point Afrique